FICHE ELEVAGE

REAL VACADA

Plan : 01.01



En 1830, le Capitaine Général d’Andalousie, Vicente Genaro (Janvier) de QUESADA (1782-1836), devenu exécuteur testamentaire de Vicente José VÁZQUEZ, vend au Roi FERNANDO VII le meilleur de la ganadería de VÁZQUEZ. _ On trouvera aussi des précisions dans TESTAMENTARÍA DE VICENTE JOSÉ VÁZQUEZ. Ce bétail est évidemment de pure caste vázquez ; on pense que le roi utilisera son propre fer.

Un roi aficionado a los toros
Être ganadero est, certes, une vieille tradition de la monarchie espagnole. FERNANDO VII n'est pas le premier souverain espagnol éleveur de bravos, loin de là [voir la fiche de l'éleveur FERNANDO VII]. Mais quant à lui, le roi FERNANDO VII est un aficionado entendu et les vazqueños l'ont séduit. Il veut vraiment les bêtes vazqueñas les meilleures et les plus choisies.

Une passion éclairée, qui fait appel à des compétences
L'exécution de la tâche est confiée au ganadero madrilène Fernando CRIADO FREIRE, éleveur de toros bravos jijón (il est neveu du ganadero andalou Fernando FREIRE, lequel a du vistahermosa). Fernando CRIADO FREIRE va se faire assister des célèbres varilargueros -picadors- Sebastián MÍGUEZ (qui est aussi un grand conocedor) et Francisco SEVILLA "EL TRONI". Voici comment les choses se sont passées.
La vente est signée et le prix convenu, sous condition que le bétail soit choisi après avoir été tienté afin de satisfaire les désirs du roi. Fernando CRIADO FREIRE recrute comme conocedor (mayoral) en chef le picadot Sebastián MÍGUEZ. Il ne se trompe pas : homme de campo, corpulent, courageux, résistant et grand cavalier, c'est surtout un excellent connaisseur du toro bravo. La tienta de la plupart des vaches de l’élevage a lieu au cortijo "CASALUENGA", avec l’aide supplémentaire du grand picador Francisco SEVILLA "EL TRONI". Il s'agit de bien choisir les animaux les plus braves.
La composition du ganado retenu pour le roi est assez variable selon les sources [voir le paragraphe : La part du roi, dans TESTAMENTARÍA DE VICENTE JOSÉ VÁZQUEZ]. Un total d'environ 700 têtes (probablement sur plus de 4.000 !) paraît bien attesté. Considérons donc que ce sont 700 têtes qui vont quitter la finca andalouse de "CASALUENGA" pour former la REAL VACADA, dans les fincas de "DEHESA NUEVA DEL REY" à Aranjuez, et les monts du Pardo…

La longue marche du troupeau
Le roi, qui posséde à Aranjuez un troupeau de mansos, hésite un peu... puis décide de le remplacer par les vazqueños. Il choisit le picador Sebastián MÍGUEZ comme conocedor -l’équivalent de mayoral- de la vacada. Il faut amener tout ce bétail près de la Cour. Le 26 juin 1830, l'énorme troupeau sort des fincas sévillanes (Utrera) de "CASALUENGA" et "CASANIEVES". Il entame son voyage vers les terres madrilènes du Jarama et les pâturages d’Aranjuez. Francisco SEVILLA, "EL TRONI" est aussi du voyage.
On suit le cours des fleuves et rivières sur les rives les plus larges. Quand le soleil est au zénith, le troupeau fait halte ; il repart le soir quand la chaleur est tombée... et que les rencontres imprévues se font plus rares. Toutes précautions qui n'empêchent pas Ginés MORAGAS, vaquero originaire de Vilches, de se faire tuer par l'un des toros qu'il accompagne, un petit matin de juillet… Le périple dure jusqu'au 7 août. Le bétail est alors réparti entre la "DEHESA NUEVA DEL REY" et d'autres fincas, situées dans les parages d'Aranjuez, dont les monts du Pardo. La "REAL VACADA" est à pied d’œuvre.

Une recherche inlassable de l'excellence
Dès l'arrivée, MÍGUEZ trouve les bêtes en assez mauvais état : Vicente José VÁZQUEZ a été un peu négligent vers la fin de sa vie… Les perturbations de la succession puis du voyage n’ont pas dû arranger les choses… De plus, il se dit qu'un courtisan jaloux de ne pas avoir été consulté par le roi suggère à ce dernier que la ganadería n'est peut-être pas aussi brave qu'on le dit...
Le roi décide de procéder chez lui à une tienta générale pour se rendre compte de la valeur réelle du troupeau. C'est certes la 2e en quelques mois ! Mais il faut dire qu'on ne tiente alors que la bravoure : a campo abierto por acoso y derribo. La direction en est confiée à l'important ganadero de toros bravos jijón : Manuel GAVIRIA DONZA ROMERO (1794-1855), de Colmenar ; il a l'amitié du roi et recevra d'ailleurs, en 1840, le títre de Marqués de CASA GAVIRIA.
Personne n'est mieux placé que GAVIRIA, familier de la Cour, pour diriger les opérations. Ayant possédé un élevage de bravos avant même d'acheter ses jijones (1824), il a une longue expérience en la matière (il fait courir les produits de ses deux troupeaux sous son nom, mais avec des devises différentes : la devise traditionnelle encarnada (rouge) des jijones, et la devise encarnada (rouge) et vert de son premier troupeau). Il sera assisté de Pedro COLÓN, XIIIe duc de VERAGUA, passionné de la caste vazqueña et de sa "pureté".
Soucieux de procéder dans la plus grande discrétion, on n'invite que quelques conseillers, dont on veut prendre l'avis. L'une après l'autre, toutes les bêtes, sauf 4, font preuve de la bravoure attendue. Le roi n’a donc pas été trompé dans son achat... ni le duc de VERAGUA dans ses intentions (voir TESTAMENTARÍA) !

Un contexte différent du notre...
Il faut bien voir qu'à cette époque, la sauvagerie des toros est première. La noblesse, telle que nous l'entendons aujourd'hui, n'est guère de mise ; le toreo est défensif, "sur les jambes" comme on dit, et très bref. Ces toros nous apparaîtraient certainement dépourvus de vraie bravoure et tout juste bons pour les corridas les plus "dures". Mais les vazqueños correspondent parfaitement à l'attente du public et au bonheur du roi, quand ils les voient combattre.
Toutefois les sensibilités sont déjà en train de basculer. Qu'on en juge avec cette double image : le toro vazqueño, très prisé, est déjà autrement fin et harmonieux que le toro jijón ; et l'évolution va se poursuivre ! Certes l'émotion prend toujours le pas sur les belles manières… certes les picadors impressionnent toujours… mais leur gloire n'est déjà plus ce quelle était. Le matador Francisco MONTÉS "PAQUIRO" ( 1805-1851) organise le spectacle, et le picador cède de plus en plus la vedette au torero à pied. La foule se passionne de plus en plus pour ce dernier, avec la variété de son jeu, ses inventions... et ses estocades ! Avec sa force herculéenne, ses prouesses devant les toros, et sa "gueule" de héros homérique qui impressionnent vivement Théophile GAUTIER en 1839, puis Prosper MÉRIMÉE, seul Francisco SEVILLA "EL TRONI" (approximtivement : 1806-1841) parvient à concurrencer, pendant 11 ans, la gloire de "PAQUIRO"… dont il est le picador ! Il mourra d’ailleurs en 1841, victime d’une chute, probablement provoquée à Madrid par le toro "VENTERO"... de VERAGUA.

Un choix hasardeux...
Fin 1831, la REAL VACADA est officiellement placée par le roi sous la direction du ganadero de Colmenar Manuel GAVIRIA, qui possède toujours son double élevage personnel. Il est nommé par mandat royal "DIRECTEUR GÉNÉRAL DE LA GANADERÍA ROYALE", et assisté du XIIIe Duc de VERAGUA, Pedro COLÓN de LARREÁTEGUI y RAMÍREZ de BAQUEDANO (connu aussi comme Pedro COLÓN de TOLEDO y RAMÍREZ de BAQUEDANO). Sans les précautions que va prendre MÍGUEZ, à l’instigation de VERAGUA littéralement jaloux comme personne de la pureté de la caste vazqueña, celle-ci n’aurait jamais pu être conservée sans croisement et le duc, qui lui donnera un nouveau miustre, s’en serait détaché. Á quoi tiennent les choses...
Car, au titre de ses attributions et après en voir référé au roi, GAVIRIA décide, au printemps 1832, de faire un croisement sur un certain nombre de vaches vazqueñas avec 6 sementales de sa propre ganadería jijona, plus 4 autres achetés à Julián FUENTES "EL INDIANO", de Moralzarzal, également de caste jijón. 10 sementales : voilà de quoi couvrir un nombre considérable de vaches ! GAVIRIA veut étudier ce que pourrait donner ce croisement, car il pense que le troupeau a besoin d’amélioration. La tentative comporte un risque majeur pour l'intégrité de la caste, mais ce n’est pas le problème de GAVIRIA.

Quand la ruse déjoue la force du pouvoir...
Heureusement, à l'instigation du XIIIe Duc de VERAGUA, passionné de la pureté de la caste et ennemi des croisements, l'ex-picador Sebastián MÍGUEZ, conocedor (mayoral) de l'élevage royal, ne fait couvrir par les étalons jijón qu'une centaine de vaches –ce qui est déjà pas mal !-, qu’en outre, il a soigneusement placées bien à part et assez loin des autres, durant tout le temps où les mâles sont avec les vaches… contrairement aux ordres reçus de GAVIRIA ! À l’époque, vaches et étalons sont tous mélangés ; on ne peut pas déterminer qui est le père de tel ou tel veau...
Au moment de la mise bas, début 1833, MÍGUEZ ne s’éloigne jamais des vaches. Suivant la ruse conseillée par le duc de VERAGUA, il fait une señal (entailles ou/et découpe aux oreilles) particulière à tous les veaux dont le père est un jijón.
La señal de la ganadería de VÁZQUEZ est la "punta de lanza/espada" (pointe d’épée). On appelle ainsi la découpe de l’oreille qui part de son bord inférieur à partir du milieu et va jusqu’à sa pointe, que ce soit en ligne droite ou en courbe. Attention : dans le dessin ci-dessus, la découpe a été faite sur les 2 bords, supérieur et inférieur, de l’oreille… C’est bien cette señal que MÍGUEZ fait à tous les veaux de la "REAL VACADA". Mais il ajoute aux veaux, mâles et femelles, qui ont un père jijón une légère modification ; si légère qu’elle ne peut être remarquée que par des yeux très avertis. Il s’agit d’une sorte de petit gland près de la pointe, une sorte de vrille (zarcillo), ce qui lui suffira pour qu’il ne puisse pas les confondre avec les autres.
Le roi meurt cette année 1833 ; il va être d'autant plus facile de faire en sorte que les toros de GAVIRIA et de FUENTES ne soient plus remis sur les vaches les années suivantes, par Sebastián MÍGUEZ. Ce qui évite de perdre la pureté de la lignée vazqueña. Quant aux produits du croisement, ils sont conservés à l'écart et seront éliminés petit à petit… ce que MÍGUEZ achèvera lorsqu'il sera en charge de la ganadería VERAGUA. Il sera d'ailleurs fait mention de bétail "croisé de jijón" lors de la liquidation du troupeau par la reine au profit de VERAGUA, en 1835 : c’est dire qu’au moins une partie de ce bétail croisé, encore très jeune, n’a pas encore été éliminée.

Les toros "fernandinos"
Les exploits des toros "fernandinos" alimentent la chronique. Le 11 juin 1831, "ARISCO", negro, saute sur les tendidos d'Aranjuez où le torero Roque MIRANDA est obligé de le tuer, dans la panique que l'on imagine ! Le lendemain, dans les mêmes arènes, "GUINDO", marqué du fer de Vicente José VÁZQUEZ évidemment, saute à son tour dans les tendidos après avoir pris 2 piques ; les matadors Roque MIRANDA et "EL TINO" le tuent dans le tendido 6 ", aidés de quelques volontaires hardis". On imagine !...
En 1833, des corridas reales sont données à Madrid pendant 4 jours : du samedi 22 juin au mardi 25. Ces courses sont données sur la Plaza Mayor, matin et après-midi. La ganaderia royale débute à Madrid le premier jour, samedi 22 juin 1833, mais dans les arènes de la Puerta de Alcalá (pourquoi ?). IL y a 5 toros pour les varilargueros (picadors) –à l’époque, ils occupent le haut de l’affiche par rapport aux matadors-, et 1 toro pour le rejón. Ces premiers toros "fernandinos" sortent sous l'appellation de "REAL VACADA", avec une devise bleue et argent. Ils ont été choisis par GAVIRIA. Ce sont : "RENEGADO", negro entrepelado ; "MARCADOR", berrendo en colorado ; "PRIMOROSO", entrepelado ; "CHARRETERO", colorado ; "VOLADOR" et "GORRIÓN", cárdeno. On retrouve bien la diversité des pelages vazqueños. Mais en dépit de tout le travail de Fernando CRIADO FREIRE, en 1830, pour sélectionner le bétail destiné au roi au moyen de tientas, ces toros ne s’avèrent pas très bons. L’explication-excuse donnée par Sebastián MIGUEZ est le manque de soins de Vicente José VÁZQUEZ les dernières années de sa vie, qui se fait encore sentir...
Certains disent que, le ler juillet 1833, GAVIRIA aurait fait courir ses toros (où ?) sous l'appellation "DE VÁZQUEZ". Les toros du roi en référence à la TESTAMENTARÍA DE V. J. VÁZQUEZ ? Bizarre !… Erreur ? circonstance particulière ?... A moins qu'il n'ait acquis un lot de vazqueños ! Saura-t-on jamais...

Les vazqueños se répandent
En 1832, FERNANDO VII offre 50 vaches, de desecho dit-on (!?…), et 2 sementals à son neveu Miguel 1er de BRAGANÇA (26 octobre 1802-14 novembre 1866), qui est Roi du Portugal (1828-1834). À la tête de l’un des plus grands élevages de bravos de tous les temps et roi d’Espagne, FERNANDO VII peut se permettre d’être… généreux. Honni soit qui le verrait se débarrasser de bétail ne lui convenant pas tout à fait ! C'est ainsi qu’est créée la "REAL VACADA DE PORTUGAL", annoncée "DUC DE BRAGANZA". Cet élevage, très côté, va étendre la caste vazqueña dans le pays, entre autres dans la ganadería primitive de PALHA ; il servira à former une partie de la cabaña brave lusitanienne. Le desecho ne devait pas être si nul !... En 1913, la ganadería de BRAGANÇA passera à Antonio FLORES ÍÑIGUEZ.

La même année 1832, FERNANDO VII offre à son frère, l'infant Francisco de Paula Antonio de BORBÓN y BORBÓN-PARMA (10 mars 1794 à Aranjuez-13 août 1865 à Madrid) 8 toros/sementals et 100 vaches de desecho ( encore !); mais il les cède si rapidement à Manuel Francisco ZIGURI (ou SIGURI ou SEGURI ou CEGURI) qu’il n’est jamais parvenu à lidier sous son nom… à moins que ce ne soit l’inverse. Cette lignée est aujourd’hui complètement éteinte.

La succession
Trois mois après la corrida royale de Madrid, le 29 septembre 1833, le roi FERNANDO VII décède en laissant une fille de trois ans, Isabel, sous la régence de sa mère, María Cristina de BORBÓN (1806-1878), 4e épouse du roi et 20 ans plus jeune que lui. Elle est nommée REINA GOBERNADORA (1833-1840) et devient de ce fait ganadera. La toujours REAL VACADA, sera dès lors désignée comme REAL VACADA DE SU MAJESTAD LA REINA GOBERNADORA. Le roi n'aura guère profité de sa ganadería favorite...


Les événements


Date : 06/1830
  • Cession de bétail :
    L'élevage TESTAMENTARÍA DE VICENTE JOSÉ VÁZQUEZ vend à l'élevage REAL VACADA 700 têtes de bétail (encaste vázquez).
    La composition de ce gros troupeau de quelque 700 têtes est délicate à établir de façon précise. Voir la fiche de la TESTAMENTARÍA DE VICENTE JOSÉ VÁZQUEZ et/ou celle de la REAL VACADA DE fERNANDO VII.

  • Création :

    On atribue ici à FERNANDO VII le fer du Real Patrimonio. Il n'st pas exclu qu'il ait été créé avant ; et il n'est pas très certain qu'il aura eu le temps d'être utilisé (tout au plus entre 1830 et 1835) !

  • Création :
    • du lieu finca DEHESA NUEVA DEL REY sur la commune Aranjuez par l'éleveur FERNANDO VII


Date : entre 1830 et 1833
  • Cession de bétail :
    L'élevage REAL VACADA donne à l'élevage ? 12 toros (encaste vázquez).

  • Cession de bétail :
    L'élevage REAL VACADA donne à l'élevage ? 26 vaches (encaste vázquez).
    Les 12 toros se répartissent en 8 novillos et 4 toros. Aux 12 toros et 26 vaches s'ajoutent aussi 2 cabestros. C'est un cadeua du roi à son épouse. Qu'en a-telle fait ???elle qui n'st pas très aficionada...


Date : le 01/01/1832
  • Cession de bétail :
    L'élevage REAL VACADA donne à l'élevage brgz 50 vaches (encaste vázquez).
    Le Roi FERNANDO VII offre 50 vaches, de desecho dit-on (!?…), et 2 sementals à son neveu Miguel 1er de BRAGANÇA/BRAGANZA (26 mai/octobre 1802-14 novembre 1866), Roi du Portugal (1828-1834). C'est ainsi qu’est créée la "REAL VACADA DE PORTUGAL", annoncée DUC DE BRAGANZA. Cet élevage, très côté, va étendre la caste vazqueña au Portugal.
    Le mois et le jour sont uniquement destinés au classement informatique.

  • Cession de bétail :
    L'élevage REAL VACADA donne à l'élevage brgz 2 etalons (encaste vázquez).
    Ces 2 sementals accompagnent les 50 vaches offertes par le roi à son neveu Miguel 1er de BRAGANÇA/BRAGANZA


Date : le 02/02/1832
Date : le 29/09/1833