FICHE ELEVEUR

Vicente José VÁZQUEZ y ADORNA


naît : 1762-04-04
meurt : 1830-02-10


Vicente José VÁZQUEZ ADORNA est le 6e des 7 enfants de Gregorio VÁZQUEZ. Il est encore jeune à la mort de son père, en 1779 ; la gestion de tous les biens paternels est confiée au fils aîné Diego Gregorio VÁZQUEZ ADORNA, au nom de la fratrie et de leur mère, María ADORNA. Il faudra à Vicente José attendre 1784 pour obtenir le droit de gérer intégralement ses propres biens, sans tuteur ; et 1792, pour que la société gestionnaire de l'héritage paternel, sous la houlette de Diego, soit dissoute. Par commodité, on le traite ici comme s'il était le ganadero en titre dès la mort de son père Gregorio ; en effet c'est à lui seul que l'on doit le développement de la ganadería qui, jusque là, ne représentait quand même pas grand chose. Beaucoup considèrent qu'il dirige de fait la ganadería dès 1780 ; mais ce n'est probablement qu'une supposition.
Il hérite donc de la ganadería, qui passe à son nom, et du fer. Il va apporter à la caste vázquez sa véritable existence et toute sa splendeur.

Dans les traces du père : promotion sociale
Comme son père, Vicente José VÁZQUEZ y ADORNA est un richissime propriétaire, expert en matière de travaux camperos et grand aficionado.
Il occupe, au fil des ans, de nombreuses responsabilités de trésorier, soit en entreprise privée soit dans des services publics. Comme son père, il sera fournisseur des armées royales basées en Andalousie. Entre 1817 et 1819, il reçoit divers titres pour services rendus à la couronne, pendant les guerres napoléoniennes entre autres : Intendant Honoraire de l'armée, vicomte de SAN VICENTE et Comte de GUADALETE. Il est très lié à la HERMANDAD DE LA SANTA CARIDAD DE SEVILLA : il y entre en 1806, et en devient Hermano Mayor de décembre 1812 à sa mort, mise à part une interruption de 11 mois en 1829. Il est resté célibataire. Ses exécuteurs testamentaires estiment ses biens à 16.056.791 réaux, comprenant 9.725 hectares, répartis sur 35 domaines, dont 2.668ha en pleine propriété et 7.057ha en fermage. Il a ainsi parachevé l'ascension sociale initiée par son père.

L'homme d'affaires
Pendant la guerre d'Indépendance contre les Français (1808-1814), en bon intendant, Vicente José VÁZQUEZ sait… "toréer" l'époque avec habileté. Il parcourt une bonne part de l'Espagne avec du bétail afin de ravitailler les troupes en lutte contre les envahisseurs... et, profitant de son passage dans des zones assez éloignées des combats pour pouvoir maintenir leurs traditions, il arrive à y vendre des bravos pour les spectacles taurins. "Business is business"…
Pendant la 1ère décade de son activité d'agriculteur, il acquiert, dans les Marismas du Guadalquivir, des terres destinées à ses toros : en location, la finca EL RINCÓN DEL MEDIO à La Puebla del Río et, en pleine propriété, EL RINCÓN DE AFUERA à Aznalcázar. Il ne reprendra la suite de ses acquisitions qu'à partir de 1812, après la guerre contre les Français : en 1813, il loue, à La Rinconada, le cortijo de CASALUENGA (3.300ha : des terres à semer, des oliviers et une grande surface de pâturages pour le bétail) qui va devenir l'épicentre de son activité agricole et ganadera ; puis des cortijos plus modestes, à Coria del Río -CAÑO NAVARRO (157ha) et EL CESTERO (300ha)- ainsi qu'à Aznalcázar -EL JUNCAL PERRUNO (475ha-) et -CASA DE NEVE (217ha)-. On notera qu'en général, il s'arrange sagement pour que ses fincas ne soient pas trop distantes les unes des autres : de 5 à 10 km.
Pour parachever la formation de son patrimoine rural, Vicente José sait profiter habilement des 3 procédures de libération des terres : désamortissement [action de soumettre des biens de mainmorte aux droits de mutation] de Godoy (1.800-1.808), dissociation et désamortissement du Trienio Liberal (1820-1823). De même, en 1819, il achète au IIIe conde de VISTAHERMOSA le cortijo de VALCARGADO (555ha), à Utrera : le comte a de graves problèmes financiers liés à la guerre d'Indépendance -il ne semble pas avoir choisi le bon camp !- (il lui a déja prêté 20.000 réaux en 1818...).

L'homme
Vicente José VÁZQUEZ, qui n'a pas fondé de famille, n'a ni héritier ni charge autre que lui-même. Généreux et pieux, il prête pas mal d'argent à des personnes ou à des institutions en difficulté. On notera : en 1818, 20.000 réaux au IIIe Conde de VISTAHERMOSA ; en 1820, 46.000 réaux au Marqués de CASA ULLOA ; en 1822, 46.754 réaux au couvent des dominicains de Séville... Sans compter quelques grands noms de l'agriculture sévillane... et ganadera, comme : Fernando CRIADO FREIRE, ou Juan DOMÍNGUEZ ORTÍZ "BARBERO de UTRERA" ; pour eux, il s'agit souvent de simples questions de trésorerie : faire face à des retards de paiement des fermages.
Vicente José sera resté 50 ans à la tête de sa ganadería. Il triomphe. Ses toros sont au sommet. En 1823, il voit la triste fin de la ganadería VISTAHERMOSA… sans se douter qu’un siècle et demi après sa mort et celle de ses rivaux, la caste vistahermosa provoquerait la quasi disparition de la sienne. Humour de la vie… un peu noir en l’occurrence. Rien n’est jamais acquis à tout jamais.
Qu’est-ce qui dure beaucoup plus de cent ans ? Le 11 février 1830, en pleine gloire, Vicente José VÁZQUEZ meurt sans descendance. Il a 68 ans. Les dernières années de sa vie, vieillisant et peut-être un peu assis sur ses lautiers, il a pas mal négligé la ganadería ; elle n'est plus aussi resplendissante… Il laisse une situation financière critique, car s’il posédait un immense patrimoine, il manquait de liquidités. Il va falloir un "juge testamentaire" chargé de la vente de ses biens, afin de faire face à ses dettes concernant la location/le bail de fincas, les achats de fourrage et de pienso, les salaires de ses nombreux vaqueros et domestiques. À la tête de 9.000 à 10.000 hectares représentant une valeur de 5 millions de réaux, il n'avait pas la trésorerie suffisante pour faire face à l'exploitation des immenses biens fonciers qu'il avait amassés. Il laissait près de 5.000 animaux -dont 1.000 vaches braves et 300 toros braves-, représentant une valeur de 2 millions de réaux, plus 16 millions de réaux en valeurs financières et créances, plus 4 millions de pesetas de l'époque.
16 réaux de l’époque valent 1 escudo [lequel contient 3,375 grammes d’or à 875 0/00 --> 1 million de réaux correspond à 62.500 escudos, lesquels contiennent 211 kg d’or à 875 0/00, soit 185 kg d’or pur]. Si aujourd’hui le lingot d’or d’1 kg vaut dans les 52.000 €, 1 seul million de réaux serait l’équivalent de 9.620.000 €. Mais si 1 escudo = 102 € actuels (en quelle année, au juste ?)--> 1 million de réaux = 62.500 escudos => 6.375.000 € => le kg d'or vaudrait alors 34.460 €... ce qui est très inférieur à sa valeur en 2020. Ce calcul, tout approximatif qu’il soit, donne quand même une idée de la fortune de Vicente José VÁZQUEZ estimée à 23 millions de réaux ( -> entre 146 et 222 millions d'€) + 4 millions de pesetas de l’époque.

Pieux et sans enfants, il lègue tous ses biens [du moins ce qu’il va en rester après apuration de ses dettes] à diverses institutions religieuses chargées d'assurer le salut de son âme, mais principalement à la HERMANDAD DE LA SANTA CARIDAD dont il était Hermano Mayor.
À Séville, à l'entrée de la Iglesia del Hospital de la Santa Caridad, on peut voir une pierre tombale gravée sous laquelle "reposent les restes mortels" de Vicente José VÁZQUEZ. Cette pierre donne comme date de sa mort : le 25 février 1830, ce qui ne correspond pas à la date communément reçue. Erreur due au fait que ses "restes mortels" n'ont été apportés là que le 14 mars 1854 ?... ou erreur dans la transmission classique de la date de sa mort ?

C’est sa succession, la TESTAMENTARÍA DE VICENTE JOSÉ VÁZQUEZ, qui va s’occuper du sort des toros.