FICHE ELEVEUR

Felipe de PABLO-ROMERO y LLORENTE


naît : 1859
meurt : 1943-12-29


N.B._ A partir de 1917, Felipe de PABLO-ROMERO y LLORENTE laisse largement la direction de la ganadería à ses 2 fils : José Luis et Felipe de PABLO-ROMERO y ARTOLOITIA ; les toros semblent être annoncés à partir de cette date comme "Herederos de PABLO-ROMERO". On ne tient pas compte ici de cette donnée assez imprécise, sauf quand on a un élément clair sur le rôle des fils.
Fils du Felipe fondateur de la dynastie des PABLO-ROMEROS, ce Felipe-ci s'occupait déjà de la ganadería un certain temps avant la mort de son père, sans doute âgé, même s'il ne la gère officiellement et sous son nom qu'à partir de 1906. Grâce à un certificat royal ("cédula real") obtenu sur demande de son père en 1903, il est autorisé à unir ses deux patronymes : désormais, PABLO y ROMERO s'écrira PABLO-ROMERO... mais cela semble être plutôt une régularisation, si l'on en croit une affiche toulousaine de 1898 (cf. le premier élevage du nom). Pourquoi cette jonction ? La raison est simple : il s'agit de prérenniser le nom, en évitant qu'au gré des héritages et des générations, l'appellation d'origine ne change : ce serait le cas en 1906, si les toros devaient alors être annoncés comme ceux de Felipe de PABLO y LLORENTE, et non comme ceux de Felipe de PABLO-ROMERO (y LLORENTE). La "marque" Pablo-Romero est née... et les antécédants familiaux [tant l'oncle ganadero Ramón ROMERO BALMASEDA, que son frère Pedro enterré à BENAZUZA] oubliés. Belle opération de prestige -de marketing, dirait-on aujourd'hui-.
En 1906 donc, le second Felipe hérite et poursuit dans l'esprit "maison" ; le célèbre fer continue sur sa lancée. Il est réputé sortir pour la première fois à Madrid sous son propre nom le 16 mai 1919 (en réalité, il y est dès 1917... et même bien avant !) : au cartel, Rodolfo GAONA, Juan BELMONTE et "NACIONAL I" ; c'est dire la considération dont jouissent alors les pablorromeros.
Des plus imposants, cet ensabanado capirote en cárdeno, mosqueado et botinero, lidié à Madrid au début du XXe siècle ; on comprend que ces toros aient fait sensation à cette époque où le bétail "d'herbe" était plus maigre ! Celui qui le caresse est Manuel MUÑOZ, second conocedor de la dinastie des MUÑOZ.
C'est ce Felipe 'II' qui, en 1910, cède comme reproducteurs à "ATENCO", au Mexique, 2 étalons et 5 vaches.
Felipe fils poursuit aussi la gestion des toros des Hermanos ARRIBAS (2)... si du moins son père l'avait effectivement commencée ! Il les revend en 3 lots (1912, 1914 et 1916). Certains pensent que son père ou/et lui aurai(en)t pu introduire dans le pablorromero un peu de cet excellent sang vistahermosa. C'est incertain, mais pas incohérent. Voici une corrida des Hermanos ARRIBAS, au temps où elle était entre les mains d'un "Felipe PABLO-ROMERO"... Et ici, une corrida de PABLO-ROMERO en 1908 à México (? : cette date semble bien précoce ; 1918 serait plus réaliste puisque c'est en 1910 que du pablorromero est cédé à ATENCO) ; et encore cette autre à San Sebastián, en 1908. Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il y a des similitudes ! Elles ne sont pas étonnantes si le vistahermosa d'Arribas est effectivement croisé de cabrera, de vázquez. On voit bien ici qu'un apport arribas dans le pablorromero n'en change guère la nature composite et ne manque pas de cohérence...
Par contre, Felipe fils [ou/et son fils José Luis, qui le seconde déjà en 1917] ajoute certainement au pablorromero du saltillo entre 1914 et 1917. Il se retrouve en effet exécuteur testamentaire du 8e Marquis de SALTILLO (Rafael RUEDA OSBORNE) [dont l'épouse et veuve est une soeur de Felipe de PABLO y ROMERO, et donc la tante du ganadero en fonction, Felipe de PABLO-ROMERO y LLORENTE]. La veuve de SALTILLO avait reçu la finca de LA HERRERÍA en dot ; à la mort de son mari, en 1914, cette finca revient dans le patrimone familial des PABLO-ROMERO. Sur ses pâturages, les 2 troupeaux, saltillo et pablorromero, vont cohabiter pendant 3 ans, à l'abri des regards indiscrets : 3 années pleines durant lesquelles Felipe fils s'occupe, seul semble-t-il, de la sélection des 2 troupeaux. Voilà qui permet à qui le souhaite de croiser facilement et dans la plus grande discrétion... En 1918, Félix MORENO ARDANUY acquiert la ganadería du Marquis de SALTILLO sur les conseils de son ami "GUERRITA", devançant Felipe de PABLO-ROMERO y LLORENTE qui en avait aussi conçu le projet.
Sur la base de ces faits avérés, une légende va naître, accréditée par le fait que, dès 1919/1920 - soit le temps qu'il faut à une génération de toros pour parvenir à l'âge adulte -, le prototype du pablorromero tel qu'on le connaît aujourd'hui - pelage, comportement, type physique - commence à émerger, pour s'affirmer pleinement dans les annéees 30.
Que s'est-il passé ? Il n'y a que 2 possibilités : soit le ganadero a radicalement éliminé les sementals et les vaches présentant les caractéristiques dont il ne voulait plus ; soit il a introduit un sang nouveau : du saltillo en l'occurrence ! C'est bien ce qu'affirment de nombreux historiens et ce que considère l'ensemble du mundillo, en dépit des dénégations de la famille PABLO-ROMERO. De fait, les pelages colorado aux multiples nuances caractéristiques des cabrera, jijón et gallardo disparaissent en quelques années pour laisser place à une grande majorité de toros cárdeno, noirs et negros entrepelados, alors que subsistent encore quelques berrendos en negro très fréquents chez hidalgo barquero 1 ou hidalgo barquero 2.
Voici 2 images éloquentes qui, sans parler des études génétiques des premières années du XXIe siècle, attestent la transformation de la ganadería à partir de 1919/1920. La première date de 1918 : Juan BELMONTE torée à Bilbao un pablorromero encore "archaïque", au museau carrément busqué et pas seulement acarnerado (comme un museau de mouton). Dans la seconde, en 1919, soit un an plus tard, il a manifestement affaire (toujours à Bilbao ???) à un pablorromero mâtiné de saltillo ; cette photo d'un saltillo de la même époque est convaiquante !

Mais les prémisses de la guerre civile sont là. En 1931, il pèse des menaces sur l'élevage bravo en raison des perspectives de réforme agraire et du problème social des latifundias, sans parler de l'image "Ancien Régime" de la corrida. L'enquête des ganaderos de la UCTL sur les surfaces qu'ils affectent au bravo [résultat global : 132.000 hectares sur 52 millions dans toute l'Espagne ; et encore y a-t-il 2/3 de terres incultivables] place les PABLO-ROMERO en 5e position avec 4.000 hectares _pour LA HERRERÍA, VENTA NEGRA et PARTIDO DE RESINA probablement_ et 800 têtes [on sait par ailleurs qu'en 1931, il y a eu 66 toros lidiés : cela semble assez peu pour un troupeau de 800 têtes...]. VILLAMARTA en a carrément le double, Juan José GONZÁLEZ NANDÍN, Félix MORENO ARDANUY et Rufino MORENO SANTAMARÍA sont assez proches de PABLO-ROMERO. Mais des troubles éclatent en Andalousie et en Estrémadure où il n'existe quasiment pas de petits propriétaires : à raison ou à tort, les grandes propriétés sont devenues des symboles du malaise social. Fin mai 1931, les ouvriers agricoles veulent s'emparer des dehesas ; ils occupent les fermes, empêchent les vaqueros de s'occuper du bétail, malmènent quelques propriétaires restés sur leurs terres. Lorsque "AGUILITA" écrit alors dans "LE TORIL" : "Deux frères ganaderos dont les toros étaient la terreur des coletudos froussards ne durent la vie sauve qu'à l'arrivée de la gendarmerie", il désigne probablement José Luis et Felipe PABLO-ROMERO y ARTOLOITIA, les deux fils de Felipe, appelés à prendre sa succession mais déjà très actifs voire aux commandes depuis de longues années [probablement 1917 ; il est d'ailleurs possible qu'à partir de cette date, les toros aient été lidiés sous l'apellation "Herederos de PABLO-ROMERO", et peut-être jusqu'en 1955 ; mais ce n'est au fond qu'une question d'appellations : on sait de toute façon qui est aux commandes et comment est mené l'élevage]. Ce n'est encore que le début des troubles... Cependant, la guerre civile ne pertrbe guère la bonne marche de la ganadería. En pleine guerre, le 27 mai 1937, dans la zone contrôlée par les armées franquistes, à Séville, Luis FUENTES, Domingo ORTEGA et Pascual MÁRQUEZ toréent une corrida considérée comme la plus insurpassable de toutes celles de PABLO-ROMERO.
A la fin des années 1930, PABLO y LLORENT, petit fils du fondateur, acquiert 60 vaches qu'il croisera avec des vaches et des étalons gamero cívico du 1er élevage de Clemente TASSARA BUIZA. Cette branche dérivée n'aura aucune suite significative.
Felipe de PABLO ROMERO y LLORENTE meurt à Sevilla le 29 décembre 1943, il a 84 ans. Depuis 1939, à 80 ans, il avait laissé la direction de la ganaderia à José Luis et Felipe de PABLO-ROMERO y ARTOLOITIA ; les voici maintenant héritiers et successeurs.