FICHE ELEVAGE

Duque de SAN LORENZO

Plan : 03.01



En 1864, le duc de SAN LORENZO, de Jerez de la Frontera (Cádiz), acquiert les gallardo, sans doute déjà légèrement mâtinés de vázquez pendant l'année où ils ont fait partie de l'élevage de Ramón LARRAZ.
Ici, les choses se compliquent en raison de la relative confusion ou des incertitudes de l'information disponible. Mais en tout état de cause, on peut considérer que le gallardo restera conservé (probablement croisé de vazqueño pour un certain nombre des bêtes nées à partir de 1865/1866, comme on va le voir ci-dessous). On sait en effet que, dans son achat à José BERMÚDEZ REINA en 1874, Rafael LAFFITTE y CASTRO trouvera 73 "vaches gallardo" : elles ne peuvent venir que de l'achat d'une part de la ganadería du Duc de SAN LORENZO par BERMÚDEZ 3 ans plus tôt, en 1871. _ Cette référence étant posée, l'affaire est des plus complexes.
° Certains disent que le Duc aurait acquis, et toujours en sa possession en 1864, une pointe de vaches gallardo [ce qui n'exclut pas quelques toros !] à la liquidation du troupeau des GALLARDO (1828/1840) ; ce n'est pas impossible, mais c'est peu attesté. Considérons ici que le Duc a effectivement formé une "pâture" avec ce lot gallardo (qu'est-il devenu pendant quelque 25 ans ?!...) et qu'il l'inclut dans l'élevage acheté à Ramón LARRAZ.
° Toujours est-il que le premier souci de ce passionné du toro de combat, qui va le devenir plus encore en se mettant à en élever, est de sélectionner avec un très grand soin le gallardo qu'il vient d'acquérir. Dans ce but, il rassemble et prend en compte toutes les informations, notes et données, qu'il peut recueillir auprès des propriétaires précédants. Et comme sa base est déjà de grande qualité, il va atteindre un niveau très enviable.
Il semble en effet que le tout début soit bon :
- Le 17 avril 1865 à Cádiz, son toro "CAMAMA" [qui ne relève donc pas encore de sa sélection !] entre 7 fois au cheval pour 7 chutes de Juan GALLARDO "EL BRAVO", Juan TRIGO et José CALDERÓN DÍAZ "DIENTES" ; sans parler des 4 chevaux étripés.
Au cours de la même course, "MOLINERO" a à son actif 9 piques, 6 chutes et 5 (ou 7) chevaux, envoyant en outre à l'infirmerie les bons picadors Juan GALLARDO "EL BRAVO", Juan TRIGO et José CALDERÓN DÍAZ "DIENTES" !...
Au cours de cette unique corrida, les 4 toros du duc, "MOLINERO", "CERRAJERO", "CAPUCHINO" et "CAMAMA" prennent à eux seuls un total de 49 piques, pour 22 chutes et 23 chevaux. De l’inédit dans les arènes de Cadix.
- On peut y ajouter, quelques jours plus tard, le 11 juin 1865, "CARCELERO", qui sera considéré comme un toro de bandera, est qualifié de superior par la presse. Il y a manifestement de la caste dans l’élevage, même si celui-ci est probablement un peu irrégulier comme tous les élevages de l'époque.

De quelles origines sont ces toros, courus peu après leur acquisition?... Ils pourraient être vazqueños ; mais il paraît évident qu'il s'agit des gallardo. En effet :
° Pour améliorer son bétail dit-on, peut-être dès que la veuve prend la suite de son mari (1864/1865), peut-être un peu plus tard, le duc achète 74 toros vázquez chez la viuda de José María BENJUMEA, dont le bétail jouit de la plus grande réputation. On voit mal le duc envoyer aussitôt ces précieux reproducteurs possibles directement dans l'arène ! _ Que fait-il alors ? Croise-t-il tout ? c'est le plus probable, compte-tenu de ses intentions, et compte-tenu des moeurs de cette époque où tout le bétail est mis ensemble dans les même pâturages. En tout cas, les résultats de l'élevage vont rester excellents, et la vacada atteindra un haut degré de perfection. Le Duc de SAN LORENZO va faire partie du peloton de tête des ganaderos de son époque.
° Dès 1866, cherchant encore à améliorer son bétail, le duc croise les vaches qu’il considère comme les meilleures avec 2 sementales de son voisin Jerezano Juan LÓPEZ CORDERO, au moment où celui-ci vient d'acquérir la ganadería de Joaquín Jaime BARRERO (lui aussi de Jerez ! Les relations jouent un grand rôle dans l'élevage bravo...), laquelle est formée de pur bétail d'HIDALGO BARQUERO 1, soit : du vistahermosa de premier choix X {vistahermosa X cabrera} X 2 étalons vázquez, le vistahermosa étant dominant. Un mélange qui forme le prestigieux encaste hidalgo barquero (1). Quels sont les résultats ? On l'ignore de façon précise ; c'est dommage... Mais on sait tout de même que l'élevage reste prestigieux :
- Son toros, "ESPEJITO", cárdeno bragado, lidié le 30 avril 1872 à Jerez de la Frontera, sera gracié après avoir pris 20 piques "sans détourner la tête" et tué 8 chevaux.
° Le duc se présente d'ailleurs peu après à Madrid avec 6 toros, porteurs d’une devise bleu ciel et blanc : le dimanche 12 mai 1872. Les picadors titulaires sont : Domingo GRANDA "EL FRANCÉS" y José MARQUETI ; tandis qu’Antonio CALDERÓN et Ramón AGUJETAS sont en réserve. Comme matadors, il y a : Cayetano SANZ, Rafael MOLINA "LAGARTIJO"et Salvador SÁNCHEZ POVEDANO "FRASCUELO". Le premier toro ne fait guère honneur à son élevage : il est si manso et collé à sa querencia (aquerenciado) qu’il faut lui couper les jarrets à la media luna ; Cayetano est sifflé. Les 5 autres vont remonter nettement le niveau ; ils laisseront 16 chevaux sur le sable.
° On notera que cette ancienneté est postérieure de quelques mois à la vente de bétail à José BERMÚDEZ REINA (1871). Cette vente n'était donc que partielle...
Du moins si 1871 est la bonne date, car certains donnent pour cette vente l'année 1874. On ne l'a pas retenue ici en raison des incohérences de dates qu'elle introduirait ensuite. De plus, une information tranche la question sans ambiguïté : si le toro "PARILLERO", toujours marqué du fer du duc de SAN LORENZO mais annoncé comme propriété de BERMÚDEZ, est couru à Séville en 1873, c'est bien que l'achat a déjà eu lieu. Soulignons qu'il reçoit 39 piques et tue 12 chevaux : grande caste !
° Le duc fera courir 6 toros une seule autre fois à Madrid : le dimanche 14 septembre 1873. Au cartel, Rafael MOLINA "LAGARTIJO", Salvador SÁNCHEZ "FRASCUELO"; et José LARA "CHICORRO". Ce jour-là, "CAPARROTA", cárdeno oscuro, sorti en 5e position, prend 17 piques. "FRASCUELO" l’estoque très bien. Les 6 toros ont tué un total de 14 chevaux.
° Le 20 septembre 1874, on trouve encore trace de 2 toros du duc de SAN LORENZO, porteurs d'une devise vert et blanc, à la Maestranza de Séville (voir plus bas).

° La patience et le temps sont essentiels pour mener à bon port les croisements expérimentaux. Or le duc mène bien trop d'affaires pour se consacrer à l'attente de tels résultats. Aussi, quelques 7 années après son achat initial, et sans attendre de voir l'évolution du troupeau sur le long terme, il se défait d'au moins une bonne partie du bétail.
En 1871, le Duc vend non pas sa ganadería, mais "une part", comme le précisent certains à juste titre. En effet, comme on vient de le voir ci-dessus, la ganadería du Duc continuera un certain temps ; en outre, une affichette du 20 août 1880 annonce 6 novillos du duc de SAN LORENZO pour les novilleros Juan LEÓN "MESTIZO" et José CORTÉS "EL LEÓN", au Puerto de Santa María. D'autre part, c'est probablement le sang gallardo qui intéresse surtout le nouvel acheteur, José BERMÚDEZ REINA, qui possède déjà de l'excellent vázquez par le viuda de José María BENJUMEA -comme le duc !-.
Bonne surprise : il restera vraiment du gallardo -sans doute déjà pas mal métissé, mais possiblement dominant voire très dominant- dans la vacada de José BERMÚDEZ, puisqu'en 1874, Rafael LAFFITTE y CASTRO trouvera encore 73 "vaches gallardo" dans le bétail acheté à ce même BERMÚDEZ. Si ces vaches sont nées avant 1864 (date de l'acquisition de l'élevage Ramón LARRAZ par le duc), il est possible qu'elle soient encore du pur gallardo ; les autres, qu'elles fassent ou non partie des 73, sont certainement déjà croisées de vázquez, tant chez le duc que chez José BERMÚDEZ REINA, ainsi que d'un peu d'hidalgo barquero (1) chez le duc.
- En tout cas, le lot acheté par BERMÚDEZ est de qualité. Témoin :
. En 1873 à Séville, toujours marqué du fer ducal mais indiqué comme propriété de BERMÚDEZ, "PARILLERO" reçoit 39 piques et tue 12 chevaux. Grande caste ! De quelle lignée est ce toro : pur gallardo, pur vázquez, croisement des 2, zeste d'hidalgo barquero (1) ?... Notons que le ganadero lui-même ne le sait pas forcément de façon très précise car, à l'époque, on ne connaît en général que les mères des veaux puisqu'elles sont mêlées avec un ensemble d'étalons !

°° On comprend que l'élevage du duc de SAN LORENZO lui ait apporté une grande popularité. Mais il joue de malchance. En 1874,
[1871 disent certains, mais cela ne semble pas compatible avec la vente à José BERMÚDEZ REINA cette même année 1871]
une épidémie (de quelle nature ?...) décime à tel point le troupeau qu'il est contraint de le reconstruire.
[Dans quelles proportions ?]
Il acquiert alors [en quelle année et auprès de qui ?] des vaches et des étalons "issus de" Rafael José CABRERA, donc du cabrera.
° Le 20 septembre 1874 - en pleine épidémie, semble-t-il !- à la Maestranza de Séville, 2 toros du duc de SAN LORENZO , porteurs d'une devise vert et blanc, alternent avec 2 de BENJUMEA et 2 de Anastasio MARTÍN. Espadas : Manuel DOMÍNGUEZ de CAMPOS "DESPERDICIOS", Manuel FUENTES "BOCANEGRA" et Francisco ARJONA REYES "CURRITO" (le fils de "CÚCHARES").
Quelles sont les origines des 2 toros du duc ?... S'agit-il de toros de son élevage originel (base gallardo X vázquez + possiblement une touche d'hidalgo barquero (1)), car il n'a pas tout vendu à José BERMÚDEZ REINA, et en outre on peut penser que l'épidémie n'a pas (encore ?) touché tout son bétail ? Ou bien s'agit-il de ses tout nouveaux cabrera ? La devise ne permet pas de trancher. Mais il paraît peu vraisemblable qu'il s'agisse déjà des cabrera, même s'il les a déjà achetés... ce qui resterait à prouver : en septembre, l'année n'est pas finie ; et il reste possible que l'achat des cabrera n'ait eu lieu qu'un ou deux ans plus tard...

On ne sait guère ce que devient ensuite la ganadería du duc de SAN LORENZO, dont cependant on trouve trace jusqu'en 1880. Une affichette du 20 août 1880 annonce 6 novillos du duc de SAN LORENZO pour les novilleros Juan LEÓN "MESTIZO" et José CORTÉS "EL LEÓN", au Puerto de Santa María. Le duc a donc gardé au moins un peu de bétail ; pour le plaisir, comme il arrive souvent ?... Que devient ultérieurement ce bétail ?...

Quoi qu'il en soit, le Duc de SAN LORENZO laisse un grand nom parmi les ganaderos du XIXe siècle. Ses toros sont renommés pour leur bravoure et leur prestance : signes d'une sélection rigoureuse et intelligente.
On ne s'étonnera pas que, vu le métissage dont ils sont le fruit, ces toros présentent une grande variété de types, de pelages et de comportements. Toutefois, cette variété est propre aux troupeaux "sauvages" d'Andalousie (entre guillemets car ce sont en réalité des aurochs du Proche-Orient domestiqués et revenus à la vie sauvage) qui sont à la source de toutes les castes andalouses.

[ATTENTION. _ Il règne une certaine confusion dans les dates et les transactions qui concernent le Duque de SAN LORENZO et José BERMÚDEZ : certains attribuent à BERMÚDEZ seul l'apport de sang vázquez. Toujours ces incertitudes qui ne simplifient pas la compréhension d'une information rarement de première main et souvent peu cohérente. On tranche ici pour une vente partielle en 1871 car c'est la date qui crée le plus de cohérence dans l'ensemble des transactions, en l'état actuel des informations recueillies, et pour conserver l'image laissée par chacun des ganaderos dans l'histoire du bravo._ Qui remontera aux sources et distinguera soigneusement ce qui est vérifié de ce qui est déduit ou conjecturé ?]


Les événements


Date : 1864
Date : entre 1864 et 1865
Date : 1866
Date : 1871
  • Cession de bétail :
    L'élevage Duque de SAN LORENZO vend à l'élevage José BERMÚDEZ REINA 50/100 vaches (encaste gallardo).
    L'existence et la quantité de vaches (pur ?) gallardo est estimée à partir du fait que, 3 ans plus tard, Rafael LAFFITTE y CASTRO trouvera dans son achat à José BERMÚDEZ REINA "73 vaches (pur ?) gallardo" : 73 est donc un chiffre minimum. Il y a aussi quelques toros ou/et étalons, dont le nombre est inconnu : BERMÚDEZ fait courir, à Jerez en 1872 et à Séville en 1873, 3 toros exceptionnels, marqués du fer du duc de SAN LORENZO. _ On pourrait aussi penser que ces "73 vaches gallardo" ne sont qu'une part peu ou pas croisée de l'ensemble des gallardo vendus en 1871 par le Duc de SAN LORENZO ; mais rien ne l'atteste, aussi cette hypothèse n'est-elle pas retenue ici. A tort ou à raison, nous sommes donc dans une hypothèse minimaliste sur le sang gallardo qui aboutira chez PABLO ROMERO et lui donnera (dit-on !) sa morphologie.

  • Cession de bétail :
    L'élevage Duque de SAN LORENZO vend à l'élevage José BERMÚDEZ REINA quelques toros (encaste gallardo).
    Avec les vaches (pur ?) gallardo, il y a aussi quelques toros ou/et étalons, dont le nombre est inconnu. C'est ainsi que BERMÚDEZ fait courir, à Jerez en 1872 et à Séville en 1873, 3 toros exceptionnels, marqués du fer du duc de SAN LORENZO.


Date : entre 1871 et 1890
  • Cession de bétail :
    L'élevage Duque de SAN LORENZO vend à l'élevage la totalité de ses têtes de bétail (encaste cb).
    Le Duc de SAN LORENZO a gardé son cabrera au moins en partie et pendant un certain temps. Quand et comment l'a-t-il ensuite vendu ou liquidé ? La vente enregistrée ici est donc plus fictive que réelle ; elle cloture cet élevage._ Certains pensent qu'il aurait pu liquider son ganado en 1874 en le cédant à Rafael LAFFITTE y CASTRO ; mais cela ressemble beaucoup à une confusion avec la vente faite par José BERMÚDEZ REINA à ce LAFFITTE.

  • Dissolution :


Date : 1874